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Chapitre IV : Sur la piste des pionniers...
Par otxoateam dans Expéditions dans le grand nord/Espedizioak iparraldean - Canada/Kanada 2008 le 18 Avril 2008 à 20:03Chapitre IV
Sur la piste des pionniersNulle autre activité à ma connaissance, ne procure le même plaisir et les mêmes sensations que le traîneau à chiens. Immersion et proximité avec la nature, glisse des patins sur la neige et direction dune formidable équipe de chiens voués corps et âmes à leur musher voilà ce que lon ressent les pieds sur les patins et les deux mains sur le montant. <o:p></o:p>
Il fait froid très froid à proximité du lac saint Jean. Jamais je navais encore affronté pareilles températures. Les parties découvertes de mon visage me brûlent et il me semble perdre un peu de sensibilité sur la peau irritée par ce froid.<o:p></o:p>
Les chiens que nous venons datteler ne tiennent plus en place et je dois concéder que moi aussi je suis pris dexcitation à lidée de traverser ces grands espaces, ces forêts et ces lacs gelés à leurs côtés. Un petit clic et le largeur libère la tension, les pulsions de ses athlètes forgés pour courir. Le rythme effréné de ce départ me fait redouter une fatigue excessive des chiens en ce début de parcours mais ils semblent parvenir peu à peu à leur rythme de croisière. A la tête de lattelage, emporté par la vitesse, subjugué à la vue de ces corps qui se plient et se déplient dans une grande souplesse, accusant comme une gifle ce vent glacial qui glisse sur mon visage un sentiment de liberté et de toute puissance menvahit. <o:p></o:p>
Mathieu et moi, lun derrière lautre et à la tête de nos attelages respectifs, nous nous engageons sur la piste ouverte par notre guide. Piste qui semble nous mener vers une forêt de sapins, laquelle, à cette distance, telle une barricade, se dessine comme un obstacle infranchissable. Les kilomètres défilant, jaccorde davantage de confiance envers ces chiens, des huskies qui, la veille encore, je ne connaissais pas. Je me familiarise peu à peu avec leurs noms et Calin, ce chien de tête roublard et expérimenté, approuve mon assurance grandissante et reste à lécoute de mes ordres.<o:p></o:p>
Nous pénétrons lépaisse forêt de conifères où la piste plus étroite, épousant le relief, nous réserve virages serrés et descentes durant lesquelles nous nous efforçons de refreiner lardeur des chiens sans quoi nous risquons de finir dans le décor étalés dans la poudreuse ou pire encore la face écrasée sur un arbre. Mathieu, musher plus expérimenté et assurément meilleur technicien sur un traîneau, semble jubiler eu fur et à mesure que nous rencontrons des difficultés. Le galop des chiens à fait place au trot, foulée plus adéquate et adaptée aux longues distances. Loccasion, tout en gardant un il sur la piste, dapprécier à leur juste valeur les magnifiques paysages que nous traversons, où la seule manifestation dactivité humaine sont ces grands espaces vierges, en réalité des champs de bleuet recouverts par cet épais manteau blanc. La piste, légèrement glacée, facilite le travail de la meute, améliore la glisse de nos traîneaux.<o:p></o:p>
Nous avalons les kilomètres et apprécions ces moments de grande quiétude, bercés par le halètement des chiens. Bien emmitouflé dans mon manteau, les mains protégées par mes épais sur gants, je ne ressens pratiquement plus les effets du froid. Il en est de même pour les chiens qui, au cur de ces températures hivernales, connaissent un regain defficacité. Seul le givre résultant de ma respiration et accumulé sur les pourtours en fourrure de ma toque, témoigne des conditions extrêmes de lhiver Canadien. <o:p></o:p>
Le repas de midi partagé autour dun bon feu est pour nous loccasion de rompre ce silence de cathédrale que nous nous imposons au cur de ce sanctuaire de la nature, parfois interrompu par un ordre directionnel à lintention des chiens. Ceux là mêmes qui, passées quelques minutes, assoiffés dactivité et bourreaux de travail, sont déjà dressés sur leurs quatre pattes, parés pour la suite de notre aventure au cur du Saguenay.
...j'ai tenté ici de me représenter sur le traîneau...
<o:p></o:p>Le temps passe. Nous ne voyons pas défiler les heures et il nous faut observer la position du soleil, par cette radieuse journée, pour nous en rendre compte. Les rayons peinent à percer les épais branchages. La lumière se fait plus discrète, plus sombre, et nous voyons la forêt sous un nouveau jour tandis que la teinte de la neige se fait plus douce, plus colorée plus clémente pour nos yeux. <o:p></o:p>
Au fur et à mesure de notre avancée, la piste se creuse et se fait plus technique, plus physique pour le musher. Nous mettons pied à terre dans les montées, donnons de notre énergie pour soulager les chiens tandis que dans les descentes, en véritables acrobates et équilibristes accomplis, nous jouons sur les transferts de poids pour nous faufiler entre les arbres, pour négocier les virages en épingles qui se font de plus en plus serrés. Passées quelques heures, je me montre plus habile et le plaisir de glisser, de prendre de la vitesse, saccroit et prend le pas sur langoisse de la chute. Je savoure toujours un peu plus ces instants en symbiose avec mon attelage.<o:p></o:p>
La fin de laprès midi approche et nous profitons de ces journées qui rallongent en cette fin dhiver pour nous offrir, avant détablir le camp, un léger détour. Il nous conduit sur les rives de lAshuapmushuan, du nom que lui donnèrent jadis les amérindiens et signifiant dans leur langue « là où on guette lorignal ». Un nom chargé de sens et de poésie pour un lieu dune beauté saisissante. Ici, la rivière indomptable, ses rapides et ses tourbillons, coulent à flot et ne cèdent en rien aux requêtes pressentes et aux caprices de lhiver. Une pente raide, vertigineuse et glacée, conduit notre regard le long de ses rivage tandis que le ciel senflamme peu à peu, dévoilant ses ardentes couleurs orangées et rougeâtres. Nous restons là quelques instants, calmes et totalement apaisés avec lincroyable sensation que nous touchons là à lun des buts ultime de notre voyage. Je me verrai bien prendre racines en ces lieux et comme les arbres qui mentourent, attendre là les premières lueurs du soir et le doux scintillement des étoiles passif et immobile. Mais la réalité se rappelle à moi nous navons pas davantage de temps à consacrer à la rêverie. Il nous faut monter la tente et allumer le feu, celui qui nous tiendra chaud durant la nuit. Cest sur les bords dun petit lac gelé que nous décidons de nous établir. Là où une loutre enjouée et énergique nous a laissé les traces bien visibles et caractéristiques de son passage.<o:p></o:p>
Nous nous mettons à luvre et prélevons sur la forêt cinq jeunes arbres nécessaires au montage de notre tente. Cinq arbres comme autant de piliers consolidant notre abri de toile. Les chiens profitent dun repos bien mérité et nous regardent dun air presque amusé nous activer avec comme échéance cette nuit qui approche et nous enlace peu à peu de son obscurité. Fruit dune négligence de notre part, nous navons à disposition quune seule lampe frontale, si bien que cest dans la noirceur presque totale que nous allons cueillir les branches de sapin et de pin qui feront office de matelas et nous isoleront du froid omniprésent à la surface du sol. Encore un arbre mort à découper en bûches pour alimenter notre poêle un peu décorce pour faire prendre notre feu et nous voilà fin prêts deux heures se sont écoulées. Soulagé de pouvoir posé la hache, je scrute ce ciel qui, distant des villes et de sa pollution lumineuse, arbore milles et une étoiles nuages de lucioles au sein de la galaxie. Je me glisse enfin sous la tente, profitant à mon tour du confort apporté par le poêle qui fonctionne à plein régime. La veillée sera courte. Nos organismes réclament, après cette journée de traîneau, un peu de repos.
...croquis de notre campement...
<o:p></o:p>Bien au chaud dans mon duvet, un lourd sommeil me gagne et simpose. Dans la nuit, emporté par mes rêves, je refais un à un les courbes et les virages de notre parcours. <o:p></o:p>
La nuit sachève et fut plutôt bonne. Le temps denfiler les différentes couches de vêtements ainsi que la veste, je chausse mes bottes et me voilà paré à affronter la fraîcheur matinale. Autre journée, autre ambiance dehors la neige tombe et disperse ses flocons sous un ciel grisâtre et brumeux.<o:p></o:p>
Les chiens sont là, recroquevillés sur eux-mêmes et la truffe bien à labri derrière lépais panache qui leur sert de queue. Saupoudrés de neige, cest un regard timide et pas totalement réveillé quils lancent dans ma direction. Lair de dire quils se trouvent bien ainsi, quils ne refuseraient pas les bienfaits réparateurs dune bonne grasse matinée. Je pense être de leur avis tant le cadre sy prête. Les températures sont légèrement à la hausse et le ciel nuageux ny est pas étranger. Je contemple notre tente prospecteur, semblable à celle quutilisèrent autrefois, chercheurs dor, bûcherons et autres pionniers du grand nord Séchappe encore la fumée de notre petit poêle à bois. <o:p></o:p>
Je pense ce matin prendre réellement conscience de l' aboutissement de notre projet. Des hommes, des chiens et une nature Québécoise qui consent jour après jour à nous révéler une infime partie de ses splendeurs cachées. <o:p></o:p>
Ca jappe, ça hurle et ça trépigne dimpatience la nuit de repos à porté ses fruits et lensemble des chiens à visiblement bénéficié dune excellente récupération. Le rythme soutenu nous emmène sur la traversée du lac pour nous replonger rapidement dans les profondeurs de la forêt boréale. Que le bruit des patins sur cette neige fraiche est doux à mes oreilles. Chaque instant passé sur mon traîneau est savouré avec une intarissable soiffe de découverte. Sur chaque virage, parvenu en haut de chacune des côtes, je lance mon regard sur lhorizon avec lintention de découvrir ce qui mattend au loin, avec quelle beauté de la nature nous allons nous retrouver nez à nez.<o:p></o:p>
De temps en temps, les chiens, plus distraits, tendent à quitter la piste. Sans doute ont-ils reniflé la piste alléchante dun gibier. Tiraillés entre ces deux instincts, celui de chasser et de courir, cest à moi quincombe la tâche de les mener dans la bonne direction, de les pousser à faire le bon choix. Ah comme il nous tarde le jour, à Mathieu et à moi, où nous pourrons emmener léquipe dOtxoa dans les confins de la Laponie et au cur des forêts dEurope de lest. Mais pour le moment nous voilà au Québec, à la tête de deux attelages et je crois que ce voyage, loin dapaiser mon désir dévasion, attise un peu plus en moi le désir de découverte des grands espaces. Chaque respiration, chaque bouffée doxygène et chaque battement de mon cur mamènent à penser que je vis ici quelque chose dunique, que je côtoie le bonheur dans ce quil a de plus brut.
...tâches diverses pour Otxoa et Ptitcruz...
<o:p></o:p>Nous quittons soudain la forêt pour entamer une légère descente. Mon pied effleure le frein à plusieurs reprises, veillant à garder toujours tendue la ligne qui me relie aux chiens. Lorsque le moment propice arrive, cest toute la puissance de lattelage que je laisse sexprimer sensation grisante <o:p></o:p>
Sensations qui se décuplent lorsque nous mettons pieds et pattes sur la grande et sinueuse rivière gelée. Limmensité blanche dans toute sa splendeur, dans ce quelle a de plus spectaculaire. Aucun relief, aucun arbre et de la neige à perte de vue. Le ciel obscurci, lourd et ombrageux pèse sur nos têtes et dissipe les rayons dun soleil mystérieux. Il y a là quelque chose dirréel une ambiance un climat un paysage marquant comme lEurope nous en offre peu. Mes yeux photographient et sattardent sur chaque détail de cette vaste étendue ma mémoire sen imprègne. La beauté des cascades et des torrents que nous découvrons un peu plus loin ny changera rien durant un bref instant jai ressenti lappel de la nature.<o:p></o:p>
Mes oreilles en bourdonnent encore .<o:p></o:p>
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Ptitcruz.
à suivre...
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Commentaires
2visiteur_crapouillesMercredi 23 Avril 2008 à 08:31super les dessins !!!! c'est super bien fait!!!!3MelodyneMercredi 30 Avril 2008 à 21:59
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la suite, la suite !!!